• Auteur : Michel-Éric Cabaret
  • Date : 18 octobre 2003 (27 janvier 2004)

Les logiciels libres au lycée Merleau-Ponty de Rochefort

Michel-Éric Cabaret est professeur d’histoire et géographie au lycée Merleau-Ponty de Rochefort [1].

Historique

Le lycée Merleau-Ponty a été « pionnier » en informatique lors de la première tentative d’informatisation de l’Éducation nationale.
Ce qui paraissait à l’époque une chance est devenu un handicap : très tôt doté, le lycée a été par la suite « oublié » de la Région et l’évolution ne s’est faite, ni au niveau du matériel, ni au niveau de la formation des collègues. En 1994, lorsque je suis arrivé, un groupe de professeurs ayant bénéficié des formations lourdes proposées lors du plan « Informatique pour tous » avaient de solides compétences en programmation Pascal, LSE ou autre, étaient à l’aise sous DOS, mais n’étaient pas trop au courant des nouveautés.

Quelques années plus tard, le retard s’était creusé : le lycée avait un matériel franchement obsolète (un parc hétéroclite de 386 et de 486 à bout de souffle et quelques Pentium déjà dépassés), hormis pour les secteurs des technologies tertiaires qui pouvaient se mettre à niveau grâce à la taxe d’apprentissage. Au niveau logiciel, la situation n’était guère meilleure : des vieilles versions de Word et d’Excel tournaient poussivement, le lycée n’ayant pas les moyens financiers d’acheter les dernières versions.

C’est à peu près à cette époque (vers 1997) que j’ai découvert Linux et le monde des logiciels libres. Depuis, je n’ai eu de cesse d’essayer de faire admettre les logiciels libres dans le lycée.

J’ai été aidé dans cette tâche par deux personnes : un collègue, Abel Segouat, détaché à l’équipe informatique du CDDP de La Rochelle (dispositif Rapsodie), qui a appris Linux avec moi, et le Proviseur arrivé en 1999 qui a pris conscience de l’urgence de mise à niveau informatique du lycée, et de l’intérêt des logiciels libres.

Notre action s’est traduite par la création d’un Comité de pilotage informatique en 2000. Son objectif principal était la constitution d’un dossier pour demander le câblage généralisé de l’établissement, que nous avons obtenu en 2002, mais dont la réalisation ne commencera que fin 2003. Mais une orientation avait été prise : celle d’équiper systématiquement les nouveaux postes ne dépendant pas des filières tertiaires de logiciels libres, ou à défaut gratuits.

Parallèlement, devait se mettre en place un intranet d’établissement, justification pédagogique du câblage.

C’est donc tout naturellement que le choix s’est porté sur un serveur tournant sous Linux.

L’état des lieux : postes clients sous Windows

Le lycée possède des sections tertiaires (STT) et des sections STS (dont une section Informatique de gestion) qui possèdent leur propre parc, financés par la taxe professionnelle ou provenant de dons. Le système exclusif y est Windows, côté serveur comme côté client. Les logiciels utilisés sont des produits Microsoft, souvent datés.

Le reste de l’établissement, de 1400 élèves environ, a longtemps fonctionné avec un serveur Novell (au CDI et à l’administation) et des clients Windows. Ce système, très onéreux, ne servait qu’à faire tourner un logiciel propriétaire, BCDI, au CDI et il ne sert aujourd’hui à l’administration que pour GEP ! En fonction des moyens, les postes étaient ou non équipés des suites Microsoft, souvent dépassées et, quelquefois hélas, piratées ! La grande majorité des postes n’étaient pas en réseau.

Grâce à l’action du Comité de pilotage, le lycée a pu bénéficier de subventions lui permettant l’achat de postes neufs. Ces postes ont été installés au CDI, rénové en 2001, en salle des professeurs, et à l’administration. Chaque fois, ces postes ont été équipés de logiciels libres ou gratuits : The Gimp, Xnview, Mozilla, LeechFTP, et bien sûr, StarOffice (5.1 puis 5.2).

Actuellement, les logiciels choisis sur les postes clients windows sont :

  • OpenOffice 1.0.3 (passage à OOo 1.1 sous peu !)
  • Mozilla Firebird
  • The Gimp
  • XnView
  • FileZilla

Il manque malheureusement actuellement un équivalent libre à Dreamweaver. Nous utilisons la version 2, largement distribuée par les fournisseurs d’accès.

Enfin une salle en terminaux X a été utilisée plus d’un an. Elle avait été équipée de 486 DX 100, avec un serveur sous Mandrake 7.2, et le XtermKit de Jacques Gélinas. Malheureusement, les postes arrivaient en fin de vie et nous ont laché les uns après les autres.

Voir le compte-rendu à :
http://www.linux-france.org/prj/edu....

L’intranet : un serveur sous Linux

Le serveur web tourne sous la Mandrake 8.2 installée en serveur. Des scripts de post-installation écrits par Abel Segouat (abel.segouat@ac-poitiers.fr) configurent le serveur FTP (ProFTP), créent des utilisateurs administrateurs (du web, du ftp), créent pour chaque utilisateur un répertoire public_html et un répertoire travail pour stocker des fichiers. Un autre script permet la création d’utilisateurs à partir d’un fichier généré par GEP, ainsi que les logins/mot de passes nécessaires à l’intranet.

L’intranet est écrit en PHP et fonctionne avec MySQL. Il s’agit de PIANO, projet dérivé de Claroline de l’Université de Louvain (Belgique), développé par une équipe de professeurs titulaires du Diplôme Universitaire « Ingénierie Multimédia pour l’Enseignement » (DU-IME) lors de leur année d’études. Vous trouverez PIANO à l’adresse suivante :
http://micheleric.cabaret.free.fr/piano.

PIANO n’est que la partie coopérative de l’intranet, qui contient également un grand nombre de pages html statiques. Chaque professeur peut utiliser le ftp pour envoyer des pages dans son répertoire personnel, public_html pour les pages web, travail pour les autres types de fichiers.

Résistances et difficultés

L’ensemble des collègues est très peu au fait de l’informatique et est persuadé qu’il n’existe rien en dehors des produits Microsoft. Ce ne sont pas les plus difficiles à convaincre.

n revanche, les utilisateurs réguliers des logiciels propriétaires sont plus réticents à l’introduction des logiciels libres. Investissement important dans des logiciels qu’ils connaissent bien, peur de l’inconnu, faux arguments (du type « les entreprises travaillent avec M$ Office, donc on ne travaille qu’avec Office »), incompréhension déontologique (piratage systématique chez certains), absence de curiosité, sont quelques-unes des raisons de leur inertie.

La seule façon de convaincre est de montrer l’équivalence qualitative des solutions alternatives. Et ce n’est pas toujours facile ! Les critiques qui me reviennent sans cesse sont :

  • pourquoi je ne peux pas utiliser le point du pavé numérique comme sous Excel ?
    (j’avoue que j’ai été content quand j’ai vu qu’il existait désormais une solution...)
  • sous Word, l’éditeur d’équations est plus facile et plus performant !
    (ça, c’est vrai, et c’est un sacré obstacle au déploiement d’OOo chez les profs de math)
  • pourquoi je ne peux pas redimensionner les tableaux à la main ?
    (heureusement c’est corrigé dans OOo 1.1)
  • je n’arrive pas à lire mon fichier Publisher !
    (oui, malheureusement, Publisher est très utilisé dans l’EN)

Plus généralement, les collègues se plaignent que ce ne soit pas « comme chez eux » ! A cela, je leur réponds qu’il ne tient qu’à eux de faire en sorte que... en installant OOo chez eux !

En ce qui concerne l’intranet, les pratiques sont pour l’instant quasi-inexistantes, malgré les avantages évidents. Je m’en sers avec une classe dans le cadre d’un Atelier scientifique, et les élèves ont vite pigé le coup.

Bilan

Même s’il est trop tôt pour conclure sur la réussite ou non de l’expérience, plusieurs point sont à noter :

  1. OpenOffice et les autres LL (Gimp, Mozilla) s’installent doucement dans le paysage. Un nombre non-négligeable de collègues utilise OOo de façon régulière, et s’y habitue ;
  2. Certains commencent à s’intéresser aux LL et à Linux. De l’attitude hostile ou indifférente des débuts, on passe à une attitude attentive ;
  3. La direction (une nouvelle équipe cette année) semble consciente de l’enjeu et comprend l’intérêt des LL, pas seulement financiers.

De plus en plus d’expériences voient le jour dans divers établissements et cela se sait.
Le fait que l’on puisse utiliser une alternative aux logiciels propriétaires séduit un nombre croissant d’enseignants, lassés de l’omniprésence étouffante de certaines entreprises dans le monde de l’informatique.

Michel-Éric Cabaret

[1] Le dessin ci-dessus est l’oeuvre de Yusrina Fauziah Rangkuti (Indonésie, 10 ans) dans le cadre du concours "Child Freedom, My Drawing, My Rights".

Commentaires

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Les logiciels libres au lycée Merleau-Ponty de Rochefort , le 18 septembre 2007 par bozier (0 rép.)

Bonjour,

L’inertie affichée par certains collègues de ce lycée ressemble trait pour trait à ceux que j’ai pu connaître dans le précédent établissement où je travaillais. Maintenant, j’enseigne à l’université dans un environnement unix initialement et linux depuis 3 ans. Il est évident qu’il faut savoir se montrer souple et ouvert d’esprit mais c’est passionnant et jouissif de se passer de Windows !!

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Les logiciels libres au lycée Merleau-Ponty de Rochefort , le 5 janvier 2007 (0 rép.)

Bravo Michel Eric et meilleurs voeux 2007 de Flo Jarnan

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Les logiciels libres au lycée Merleau-Ponty de Rochefort , le 26 juin 2006 (0 rép.)

Bonjour à toutes et à tous,

Je suis un ancien (pas encore très, mais ça va venir !) du Lycée Pierre Loti de Rochefort. Je suis fonctionnaire au Ministère des finances. Je travaille sur cinq machines dans le cadre d’un gros projet fondé sur l’exploitation de statistiques du Commerce extérieur de la France.

Trois de ces cinq machines sont interconnectées sur le réseau Intranet (TCP-IP) de mon Administration et équipées de FEDORA V. Une est sous Windows XP et enfin la dernière sous Windows 98 pour les échanges Internet - en dehors du réseau Intranet pour ne pas contaminer le réseau par des attaques virales incessantes.

J’aimerais bien pouvoir échanger des informations avec vous sur l’emploi et la maintenance des logiciels libres en dehors des chats et autres forums où les échanges sont souvent sommaires.

Ma dernière réalisation technique vieille de trois jours seulement : gérer en réseau les onduleurs (UPS) qui équipent mes machines après avoir défini un poste-maître et trois esclaves pour arrêter " proprement les machines en cas de coupure prolongée de l’alimentation électrique. Le poste maître est un poste Linux FEDORA V, les esclaves deux postes Linux FEDORAV et le poste Windows XP. Le processus : au fur et à mesure que le pourcentage de charge de la batterie de l’onduleur alimentant la poste-maître décroît, l’ordre d’arrêt (SHUTDOWNCMD) est envoyé au poste esclave 1, puis deux, puis trois, pour être exécuté. Le poste-maître s’arrête en dernier après enregistrement de tous paramêtres dans un journal.

La prochaine étape : utiliser la commande " CRON " pour arrêter et relancer les machines pendant les temps morts du week-end et souvent de la nuit, avec possibilité de marche forcée pendant ces périodes.

Si tous cela vous intéresse je reste à votre disposition pour tous renseignements utiles.

Thy’i va ch’a p’tit, va loin ! Coume zou disiant thiéllées cagouilles.

Amicalement

William Dufour

William.dufour@douane.finances.gouv.fr diidf.dufour@free.fr

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Les logiciels libres au lycée Merleau-Ponty de Rochefort , le 6 avril 2006 par Ekel (1 rép.)

Bonsoir,

sous Word, l’éditeur d’équations est plus facile et plus performant ! (ça, c’est vrai, et c’est un sacré obstacle au déploiement d’OOo chez les profs de math)

Comment ai-je bien lu ?

Cordialement

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Les logiciels libres au lycée Merleau-Ponty de Rochefort , le 6 avril 2006 (1 rép.)

C’est vrai Open Office est libre et gratuit mais il reste dans l’ensemble du système éducatif français de nombreuses licences du pack office non utilisées , sous exploitées et largement suffisantes pour le fonctionnement bureautique et pédagogique d’un lycée et d’un collège. Il y a un gachis d’argent sur des versions antérieures qui dépassent les capacités largement de l’Open office d’aujourd’hui. Ce n’est pas la derniere version d’un logiciel qui est importante mais c’est plutôt ce que l’utilisateur veut et peut en faire. Et les capacités du pack office 97 de microsoft ne sont exploitées qu’ 10%

Les logiciels libres au lycée Merleau-Ponty de Rochefort , le 6 avril 2006

Oui, mais l’avantage du libre est que les élèves peuvent l’installer chez eux ou ailleurs sans restriction, ainsi que les profs.

A mon avis la plupart des établissements scolaires ne sont pas à jour de leurs licences en terme de nombres de licences par rapport au nombre de postes. Combien de logiciels sont achetés en 1 exemplaire pour n installations ? Passer au libre permet de se remettre en conformité avec la loi.

Je pense que la difficulté du libre pour un gestionnaire de parc informatique est plutôt de gérer et de trier parmi les différentes versions successives pour éviter de constamment réinstalller des logiciels. Ex. en moins d’un an avec OpenOffice : 1.1, 2.0, 2.0.1, 2.O.2 et ce n’est pas fini.

Par ailleurs, il serait bien de mener une action visant à redistribuer à d’autres établissements, les licences de produits devenues inutiles.

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> Les logiciels libres au lycée Merleau-Ponty de Rochefort , le 12 octobre 2004 (0 rép.)

je veux avoir une idée sur ces logitiels ainsi que ses utilisations. MERCI.

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> Les logiciels libres au lycée Merleau-Ponty de Rochefort , le 15 décembre 2003 par Lépine JEAN (0 rép.)

C’est très exactement l’histoire du logiciel libre de notre lycée ! Avec les mêmes problèmes qui tournent pratiquement tous autour du traitement de texte ! Personnellement avec le tableur j’ai du réécrire tous mes cours pour les élèves de secondes (notamment ceux qui utilisaient le VBA inutilisable sous OpenOffice CALC) ! J’ai même été obligé d’apprendre le langage d’OOcalc pour reprogrammer le traceur de surface (TS et TES) que les profs de maths utilisaient sous Excel ! Enfin, ça avance et nous n’avons pas les moyens de revenir en arrière (une licence pour 300 machines de Office XP je ne vous raconte pas le prix !)

-----> Lycee NDBN Beaupréau

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> Les logiciels libres au lycée Merleau-Ponty de Rochefort , le 21 octobre 2003 par Fabien (0 rép.)

Au niveau du serveur, sachez qu’une solution simple et fiable peut être plus économe en temps d’administration, je veux parler du serveur Free-EOS.

Les nombreux services offerts, sans connaissance Linux requise, avec une administration aisée via interface web.

Bref, à tester sur une machine de récup pour se faire une idée plus précise ;o)

-----> La notice Framasoft du serveur Free-EOS

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Les équations , le 20 octobre 2003 par alzorglub (0 rép.)

Il est hors de question d’utiliser sérieusement Word pour écrire des équations, ou alors assez peu dans un document, sinon on s’expose à de fréquent plantages.. Ici les chercheurs utilisent souvent ScientificWord, qui lui même utilise LaTeX, mais qui est loin d’être gratuit. Trois chercheurs et même un stagiaire écrivent même directement en LaTex et le compile avec MikTex.

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> Les logiciels libres au lycée Merleau-Ponty de Rochefort , le 18 octobre 2003 par Zerg (0 rép.)

Bonsoir,

Pour vos créations de pages web, pourquoi ne pas installer et utiliser GuppY (http://www.freeguppy.org), logiciel libre et gratuit (pour lequel j’ai écrit le manuel utilisateur) ? Voyez la notice framasoft à son sujet (rubrique cms). Il s’agit d’un portail web facile et sans base de données : léger, aisément manipulable par toute personne, même inexpérimentée, il tourne aussi bien en local qu’en ligne.

Voilà, certains parleront d’autopub, moi je dirai simplement que GuppY est formidable ;-)

Que votre soirée soit douce,

Zerg

-----> http://www.freeguppy.org

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> Les logiciels libres au lycée Merleau-Ponty de Rochefort , le 18 octobre 2003 par Alain Di-Rollo (0 rép.)

Bonsoir. Le lycée aimerait t il recevroir gratieusement une version d’ ALLEGETICE.

Vous pourriez ainsi trouver d’autres logiciels qui pourraient vous intéresser mais surtout diffuser le cédérom auprès de vos collègues et élèves.

Contactez moi en Email.

Cordialement Alain Di-Rollo

-----> Allegetice

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Au sujet des équations mathématiques , le 18 octobre 2003 par Emmanuel P. (2 rép.)

Bonjour, je reviens de la fête de la science où j’ai assisté à une démonstration de Freeduc 1.4, et un logiciel m’a surpris au niveau des écritures mathématiques : je crois qu’il s’agissait de Texmaths (à vérifier). En quelques secondes, il a fait appraîtrs une équation employant des racines de fraction, des intégrales parfaitement intégrées ! Peut-être est-ce une voie à creuser ?

> Au sujet des équations mathématiques (Freeduc-cd 1.4) , le 18 octobre 2003 par Hilaire

Puisque Freeduc-cd 1.4 semble ciculer officieusement, je peux informer que la version finale sortira le 30 octobre :-)

A propos de TeXmacs, on a fait quelques améliorations dans Freeduc-cd 1.4 pour que TeXmacs démarre beaucoup plus vite.

> Au sujet des équations mathématiques , le 18 octobre 2003

http://www.texmacs.org/

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