Conseils à Microsoft au sujet de ses logiciels grand public



http://www.synthesist.net/writing/o...
(relecture Alexis Kauffmann)
http://www.framasoft.net
Elle est placée sous licence de document libre GNU/FDL

Le marché des logiciels commerciaux préemballés pour PC a commencé à s’essouffler au moment même où Microsoft tournait à plein régime. Nous étions à l’époque de la vague internet, un phénomène que la société a épousé sans vraiment l’intégrer au coeur de sa politique de conception de ses produits. Certes, alors qu’éclatait la crise de la nouvelle économie, Microsoft, fidèle a sa croyance rigoureuse en les lois du marché, préserva ses profits. Mais le vent avait tourné. Et l’idée que le Net est un lieu bien plus intéressant que le simple PC a alors commencé à s’insinuer dans l’esprit des consommateurs et des entreprises.
Durant cette période la plupart des produit traditionnels de Microsoft ont ainsi manqué la virage internet, quand bien même ils faisaient semblant de mener la danse. Ce qui fait qu’aujourd’hui la suite bureautique Office doit dépasser l’abstraction qu’est le document alors que les utilisateurs ont bien compris que via un site Web on était désormais susceptible d’accomplir de nombreuses tâches. Le système Windows, aussi brillant soit-il en tant que client, doit s’extraire de son enracinement centré sur le PC pour capturer une part significative de la toile. Et les outils de développement Microsoft doivent adopter la logique et la souplesse des développeurs actuels d’applications professionnelles ou ludiques qui n’oublient jamais le réseau dans leurs projets.
La réticence de Microsoft à adopter un comportement "réseau" est compréhensible. Leur position dominante a été construite au cours des années en adhérant à la doctrine qui énonce qu’un logiciel qui tourne sur un PC est le lieu naturel de l’intégration du matériel et des applications. Malheureusement, les protocoles de réseau se sont révélés être des intermédiaires nettement meilleurs, et Microsoft, concentré sur la vente de son concept de "PC franchisé", a du résister à se joindre totalement à ce modèle d’intégration en réseau. Ce cas de déni corporatif a évidemment laissé un vide, dans lequel des fabricants de matériel, des entreprises et tous les mécontents du monopole Microsoft, ont créés une grande quantité de logiciels libres, de qualité souvent inférieure, mais étant néanmoins mieux à même de répondre aux nouvelles exigences du mode de travail en réseau. Microsoft fait encore les meilleurs logiciels clients, mais la meilleure opportunité n’est plus dans ce créneau. C’est la où se fait encore la plus grosse marge, mais les logiciels réseau vont finalement éclipser les logiciels clients purs.
Alors que les infrastructures d’informatique en réseau arrivent à maturité, le marché des terminaux PC clients reste important de la même façon que les fabricants d’automobiles, de trains et de téléphones sont restés importants alors que leur propre réseau se développait. Le PC poussera vers l’avant les Pocket PC , les Tablet PC, et d’autres formes émergeront. Mais les fabricants de voitures, de trains, et de téléphones fabriquent réellement des produits, plutôt que de vendre des octets intangibles sur un cédérom à des partenaires qui s’occupent du matériel. Est-ce que Microsoft pourra continuer de convaincre ses partenaires que ses logiciels ont une valeur intrinsèque bien distincte ? Les entreprises d’équipements informatiques, qui fabriquent réellement les machines, sentent déjà le changement qui se profile à l’horizon et la percée du logiciel libre en est le résultat.
Dans un marché en pleine expansion, l’expertise en matière de logiciel est encore essentiel, et Microsoft est tout à fait capable de surmonter ses handicaps comme elle l’a fait par le passé. Le terme "PC franchisé" n’est pas juste un bon mot ; le nombre de programmes écrits pour les PC et qui font quelque chose d’utile (piloter un métier à tisser, contrôler une perforatrice, créer une feuille de calcul, monter un enregistrement sonore…) est immense. Mais pour continuer à être le leader, Microsoft doit innover rapidement. Et si le PC est tout ce que l’avenir nous réserve, alors les perspectives de croissance sont bien faibles. J’ai passé beaucoup de temps au cours de ces dernières années à essayer de limiter les dégâts, et je suis bien placé pour savoir que la société a grand besoin d’une supervision adulte et responsable. Car il va falloir des années pour que Microsoft se remette de la perception que les gens en ont actuellement , à savoir : une société paranoïaque, indigne de confiance, cupide, et politiquement inepte. Et rester le producteur de logiciels grand public le moins cher pendant une telle période de convalescence sera une tâche difficile et aura comme effet secondaire de transformer Microsoft en un lieu où ce seront les managers et les comptables plutôt que les visionnaires qui prendront les décisions.
Si Microsoft n’est pas capable d’innover suffisamment rapidement ; ou de s’adapter pour épouser l’idée de l’intégration réseau, la menace à laquelle il aura à faire face sera celle de l’érosion de la valeur économique de ses logiciels à cause du mouvement du logiciel libre. Et il ne s’agit pas que de Linux. Linux est bien évidemment d’ors et déjà une menace pour les plus que perfectibles logiciels serveurs de réseau Microsoft (et pour les ordinateurs de bureau dans un futur pas si éloigné que cela), mais ce sont les logiciels libres en général, surtout ceux qui fonctionnent sous le système d’exploitation Windows, qui constituent aujourd’hui une plus grande menace encore. Car à mesure que la qualité de ces logiciels libres s’améliore il y aura de moins en moins de raisons de payer pour les équivalents propriétaires du catalogue de Microsoft qui, à trop vouloir convenir à tout le monde, finissent par apparaître lourds et monolithiques. Ainsi Microsoft vend Office alors que les gens n’ont peut-être besoin que d’une petite partie de Word et un bout d’Access. Microsoft vend la plate-forme Windows alors qu’une petite organisation n’a peut-être besoin que d’un site web, ou d’un serveur de fichiers. Cela ne correspond plus au modèle commercial de Microsoft d’avoir une offre émanant de nombreux individus et d’innover avec de nouvelles applications. Et c’est malheureusement justement là où le logiciel libre excelle et creuse des sillons. Le style "taille unique pour tous", "une appli c’est tout ce dont vous avez besoin", "un api et on se fiche du reste" finit par ne plus être la bonne stratégie sur le long terme.
Ériger des barrières pour stopper la montée des logiciels grand public en source libre ne marchera pas. Ce serait comme essayer de stopper l’internet, ce que Microsoft avait fait pendant un temps avant de trouver plus de sagesse. Toutes actions pour diminuer les alternatives en limitant l’interoperabilité ou les options d’intégration seraient sources de danger puisque cela rendrait furieux les consommateurs, accélérerait la divergence avec les plates-formes libres, et aurait encore d’autres effets indésirables. En dépit de cela, Microsoft risque de choisir cette voie, à cause de l’illusion que constitue des expressions comme "on est mieux ensemble", "une plate-forme unie", et "logiciel intégré". Il y a le faux espoir à Redmond que ces approches démodées de l’intégration logicielle attireront et conserveront gentiment les marchés internationaux, les gouvernements, les universités, et encore plus important, les innovateurs, au sein de la sphère d’influence Microsoft. Mais cela ne fonctionnera pas.
De nouvelles applications réseau fascinantes sont en train d’être écrites en ce moment. Le temps ne s’arrête pas. Microsoft doit survivre et prospérer en apprenant du mouvement du libre et en lui empruntant et améliorant ses techniques. Le mouvement du logiciel libre forme une vague aussi grande et puissante que celle de l’internet, et il se constitue en une alternative légitime à Windows. Il doit, et peut, être exploité. Il existe beaucoup de gens intelligents et motivés qui pour des raisons diverses et variées évitent d’acheter directement de la technologie propriétaire Microsoft. La société doit user de diplomatie pour courtiser ces clients-là ; une insistance bornée serait à la fois inefficace et contre-productive. Pendant la vague du logiciel libre, Microsoft ne peut prospérer comme une île, avec des systèmes de défense basés sur des procédures et des protocoles propriétaires.
Pourquoi être distrait et regarder en arrière vers les cloneurs de logiciels grand public du monde du libre ? Ces cloneurs, qui s’attirent les faveurs des consommateurs sensibles au prix, rendent le marché de ces logiciels périlleux et de moins en moins bénéficiaires. Il y a une nouvelle tendance qui se dessine. Celle de logiciels "collectifs" construits avec les protocoles ad hoc et avec des fonctions organisées en modules. Il y a la robotique et toutes les formes d’automatisme qui montrent une demande pour des façons de penser nouvelles et sophistiquées. Il y a les consommateurs qui ont une soif inextinguible pour des nouvelles formes de divertissement. Il y a les vendeurs de matériel qui continuent de pousser vers des architectures qui vont fondamentalement changer la façon dont les logiciels sont construits en introduisant une concurrence savamment dosée. Tout ceci ne peut-être ignoré. Or il n’y a pas de consensus clair au sujet des systèmes d’exploitation ou des applications qu’adopteront ces domaines. Prendre position pour créer des applications utiles, non pas pour une utilisation individuelle liée a un simple ordinateur, mais à un niveau supérieur, seront à l’origine de bons retours sur investissement et ce pour longtemps.
Arrêtez de regarder derrière vous et inventez quelque chose !
Commentaires
<< Poster un message >>
:: question :: précision :: avis :: commentaire :: bug ::
beats by dre
, le 10 mars 2013 par beats
(0 rép.)
Conseils à Microsoft au sujet de ses logiciels grand public
, le 5 octobre 2006 par denis
(0 rép.)
Microsoft, de qualité ? N’exagérons rien !
, le 4 octobre 2006 par quatrecouleurs
(0 rép.)
> Advice to Microsoft regarding commodity software
, le 25 février 2003 par jean-marc
(1 rép.)
les logiciels libres plus forts que linux
, le 24 février 2003 par O.Leroy
(0 rép.)
Informations complémentaires
Faire un don ? (défiscalisé)
Aidez-nous à atteindre notre objectif de 1080 donateurs récurrents pour assurer notre pérennité et notre développement !
Autres articles...
- Conférence Hadopi Versus Licence Globale : Quels enjeux ? (mardi 13 septembre 2011)
- Art Libre Festival : 4 ème édition
- 10 juin 2011 : Rencontre exceptionnelle entre Richard Stallman et Albert Jacquard
- Coup de gueule contre la non implication des associations caritatives et de promotion du logiciel libre
- Organisation du Forum des libertés contre la Loi Hortefeux/LOPPSI2 (08/02/2011)
Informations générales
Sur le Framablog
Juste une image
Pennsylvania Ave - Old Post Office to the Capitol at Night
- Creative Commons BY-SA